Si Djeh’a et le clou

26022021

 

 

 

 

 

 

Si Djeh'a et le clou dans Littérature 210124095626263263 

 

 

 

 

 

 

Le jour où il vendit sa maison, un homme la lui acheta. — «Mon ami, lui dit Djeh’a, je t’ai vendu la maison ; mais le clou qui est planté dans le mur, je ne te l’ai pas vendu. Demain, ne va pas dire ; « tu m’as vendu aussi le clou. » Je ne te l’ai pas vendu, je ne l’ai vendu que la maison. »

 

- « C’est bien, répondit l’acheteur. Je t’achète la maison. Le clou qui est planté dans le mur, je ne te l’achète pas. »

 

L’acheteur pensait : « Ce clou m’est égal. J’ai acheté la maison ; peu m’importe le clou.»

 

Si Djeh’a alla trouver sa mère : « O ma mère, que de jours nous avons passés avec la faim ! Aujourd’hui, j’ai vendu la maison» – Elle dit : « Comment ! tu as vendu la maison ! Et où habiterons-nous ? Outre la faim, il nous faudra encore dormir à la belle étoile ? » — « Ne crains rien, ô ma mère, répondit Djeh’a. Je lui ai vendu la maison ; mais je me suis réservé un clou que j’ai planté dans le mur. Je ne le lui ai pas vendu. Maintenant, c’est avec ce clou que je lui reprendrai la maison. Nous mourons de faim ; c’est pour cela que j’ai imaginé cette ruse afin que l’acheteur nous donne de l’argent, et alors nous mangerons. Quant à la maison, il en sortira. » — « Comment ! fit-elle. Tu lui as vendu la maison et tu dis qu’il en sortira! De quelle manière en sortira-t-il, attendu qu’il t’a remis l’argent en présence de témoins ? » – « Tiens-toi seulement en repos, répondit Djeh’a. C’est moi qui vais combiner un plan dans ma tête afin de le faire sortir de la maison. » — « Fais ce que tu voudras, dit-elle. »

 

Si Djeh’a s’en alla acheter des peaux d’animaux. Il les apporta et les suspendit à ce clou. Il y suspendit également des boyaux. Peaux et boyaux restèrent là. Un ou deux jours après, ces peaux et ces boyaux sentirent mauvais. Djeh’a vint et les laissa comme ils étaient.

 

Celui qui lui avait acheté la maison vint le trouver et lui dit: « Qu’est-ce que c’est que ce marché-là, Si Djeh’a ? Tu as apporté des peaux et des boyaux et tu les a suspendus dans la maison ! Ils sentent mauvais. Qui pourrait, à présent, rester dans ce logis ? » – « Ami, répondit Djeh’a, je t’ai vendu la maison, n’est-ce pas ? Le clou, je me le suis réservé et je t’ai dit que je ne te le vendais pas. A présent tu n’as plus rien à dire. » – L’autre lui dit : « Va à ta maison. Moi je la quitte. Je t’abandonne et l’argent et la maison. Je ne puis plus y demeurer. C’est une infection générale et la maison elle-même est empestée. » – « Eh bien, dit Djeh’a, si tu veux sortir de la maison, sors. L’argent, je l’ai dépensé et je ne te rendrai même pas un sou. » — « Je te fais grâce de la maison et de l’argent que je t’ai remis, lui dit l’acheteur. »

 

Si Djeh’a partit et retourna à sa maison. L’autre se mit en quête d’un nouveau logement.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 




Conte Chaoui : Histoire de la Perdrix et du Magicien SERDESLAS

30112020

 

 

 

 

 

 

 

Conte Chaoui : Histoire de la Perdrix et du Magicien SERDESLAS dans Littérature 201022080639843045

 

 

 

 

 

 

 

 

Il y avait deux femmes, l’une rusée et l’autre imbécile.

 

L’insensée dit à la rusée. Comment fais-tu ton lait?Je le trais, répondit-elle, et je le verse à terre.

 

L’imbécile partit, et fit comme on lui avait dit, tandis que la rusée cachait son lait. Quand vinrent des hôtes chez cette dernière, elle leur donna du lait, ils mangèrent des dattes, du pain, des noix et de la viande ; puis ils se rendirent chez l’insensée. Celle-ci alla consulter sa voisine. Que dois-je donner aux hôtes? lui dit elle. Donne-leur, dit la rusée, des noyaux de dattes, des os, des coquilles de noix. Elle partit, et agit ainsi à l’égard de ses hôtes, qui s’en allerent sans manger.

 

Une autre fois, la rusée dit à l’imbécile : Allons placer des lacets pour prendre des perdrix. Elles en prirent deux et les emportèrent chez elles. Que dois-je leur faire? dit l’insensée à sa compagne. — Donne-leur, répondit celle-ci, une goutte d’eau, un brin d’alfa, et alors elles cuiront. L’insensée s’en alla et fit ainsi. La rusée égorgea sa perdrix, lui enleva les intestins, la mit dans la marmite, ajouta de l’eau, des oignons, du piment, du sel, de l’ail, alluma le feu, fit du couscous, et mangea, elle et ses enfants. Son fils sortit, portant en main un morceau de viande. Le fils de l’insensée l’aperçut, retourna chez sa mère et lui dit : Apporte notre diner, que nous mangions notre perdrix.

 

Va la chercher, lui dit sa mère. L’enfant souleva le keskas : la perdrix, dans la marmite, le regardait. Maman, s’écria-t-il, voici que la perdrix me regarde avec ses yeux. Lève la couscoussière, dit la mère. L’enfant l’ôta, la perdrix prit aussitôt son vol, et alla se poser au sommet d’un grand arbre sous lequel dormaient le lion, la panthère, le sanglier, l’hyène, le chacal, la gazelle, le lièvre, la tourterelle, le ramier, le merle.

 

Au milieu de la nuit, la perdrix eut envie de pisser. Elle pissa, et une goutte tomba sur la tête du lion. Celui-ci dit à ses gens : Sortez, et allez voir s’il fait de l’orage. Le renard sortit, et lui dit : Le ciel est blanc comme mon pelage. La tourterelle sortit, et dit : Le ciel est bleu comme mon oeil. Le chacal sortit, et lui dit : Il est gris comme mes poils. Le lion dit à la fourmi : Monte au sommet de l’arbre. La fourmi monta, et trouva la perdrix changée en une femme enceinte.

 

Quand vint le jour, les animaux se disposèrent à aller paitre. Le lièvre restat et dit : Je ne paîtrai point. La fourmi piqua (la femme) au bout de l’orteil. Celle-ci tomba, son ventre se déchira, et il en sortit un enfant vivant. Le lièvre le prit et le cacha; ensuite il égorgea la femme, la coupa en morceaux et la fit cuire. Quand les animaux rentrèrent, il la leur partagea. Tous en mangèrent, à l’exception du lièvre qui cacha sa part. Le chacal aperçut l’enfant, il ne voulut point aller paître: Va au pâturage, lui dit le lièvre, je te donnerai ma part. Il partit. Le lièvre alla vers l’enfant, lui mit des souliers aux pieds, et lui dit : Va, et prends garde de boire jusqu’à satiété.

 

L’enfant partit, arriva à la rivière, et but jusqu’à se désaltérer. Des cornes lui sortirent de la tête comme celles d’une gazelle. Il plaça ses souliers à l’extrémité de ses cornes. Sa soeur sortit, il lui dit : Ka ra ra ra, ô Aïcha, ô ma soeur. Elle prit la fuite; il lui dit : Ô Aïcha, Ka ra ra ra, je suis ton frère.

 

Elle s’en alla, cherchant le propriétaire d’un champ planté de henné. Elie en trouva un, nommé Serdeslas, c’était un magicien ; elle l’épousa. Ensuite, elle voulut tuer son frère. Elle dit à Serdeslas : Place-toi à l’ouverture de l’outre. Il alla se placer ainsi et devint serpent. Aïcha dit à son frère : Va verser l’eau. Il alla, et trouva Serdeslas à l’entrée de l’outre : Que fais-tu ici ? lui dit-il, – Le temps est chaud, répondit Serdeslas, je reste à la fraîcheur. Sors, lui dit-il, pour que je verse l’eau. Sa femme lui dit Va te cacher dans mon vêtement. Après cela elle dit à son frère : Va laver mon vêtement. Il alla et jeta le vêtement dans l’eau. Il aperçut Serdeslas, lui donna un coup de bâton dans l’eau, et le tua.

 

Puis il revint. Sa sæur lui dit : Appelle ton oncle pour qu’il vienne manger le déjeuner. Il dit : Mon oncle, c’est mon père. Elle lui dit : Pourquoi dis-tu ton père, puisque c’est ton oncle ? Il lui dit : Il est mort.

 

Où est sa tête? répondit-elle. Il dit : Je l’ai laissée. Mais il mentait, car il avait apporté la tête sous ses vêtements. Il lança la tête du serpent dans le couscous. Sa soeur en mangea et elle mourut.

 

Il sortit alors pour aller se placer comme berger. La femme chez qui il travaillait dit à son mari : Tuons ce berger. — Demain, répondit-il, nous lèverons la tente et nous nous établirons sur la crête d’un rocher. Nous mettrons l’enfant dans un tellis, d’un côté. Comment ferons-nous le contrepoids de l’autre côté? dit-elle. — Il dit : Nous mettrons une petite outre de beurre frais.

 

Ils partirent au matin, et quand vinrent les ténèbres, il se placèrent sur la crête d’un rocher. La femme dit au mari : Tourne le côté du tellis où est l’enfant vers la crète du rocher, enfin qu’en nous levant nous le précipitions. Ensuite ils s’endormirent. L’enfant se leva, retourna le tellis et mit le côté du beurre sur la crète du rocher; puis il se cacha lui-même à la place du beurre et ferma le tellis sur lui.

 

Quand l’homme et la femme se levèrent, ils dirent : Maintenant il dort, précipitons-le. Ils délièrent le tellis, et lancèrent la petite outre du haut du rocher.

 

Au matin, ils se levèrent, plièrent la tente et partirent. Pendant la route, l’enfant eut envie de pisser, et il urina dans le tellis. La femme dit à son mari : Notre beurre commence à fondre ; et elle tendit la main pour se graisser les mèches de côté. A son tour, le mari tendit la main pour se frotter le cou.

 

La nuit, ils dressèrent la tente et ouvrirent le tellis pour en tirer le beurre afin de faire le diner. Ils trouvèrent l’enfant à la place du beurre, et se mirent à pousser des cris jusqu’à ce qu’il prit la fuite. Il rencontra une vieille et lui dit : Je me mets à ton service et serai ton berger. – Reste, lui dit-elle, mais lorsque l’enfant allait paitre, la vieille ne lui donnait pas beaucoup de pain. Lui, de son côté, emmenait toujours les brebis au même endroit, et les y laissait du matin jusqu’au soir; le troupeau revenait affamé. La vieille lui dit : Voilà que le troupeau revient et il a faim!Ce que tu me fais pour le pain, répondit-il, je te le fais pour les chèvres. – Va-t’en, lui dit la vieille.

 

Il marcha beaucoup, jusqu’à ce qu’il arriva au village de sa grand’mère. Il lui dit : Conduis-moi chez le roi des génies, pour qu’il m’instruise. Lorsqu’il fut savant, il revint chez sa grand mère. Il lui dit : Amène-moi au marché, je deviendrai mulet et tu me vendras, mais prends garde d’emporter la bride.

 

Elle le conduisit au marché, et le vendit au roi des génies. Elle oublia la bride. Le roi des génies emmena le mulet à la source et lui enleva la bride pour le faire boire. Il redevint aussitôt enfant, et retourna chez sa grand mère chez laquelle il resta jusqu’à sa mort.

 

 

 

 

 

 

 

ELK’OÇÇETH EN TSEKKOURT, ED’ SERDESLAS ASEH’H'AR (1)

 

Ellant sent en ised’nan, hicht tmizrag’t hicht tabahloult. Habahloult henna i hemizrag’t : Mammeχ tsaouidh ari ennem? Hennas : Netch tezzir’th, touezzarth d’i hemourth. Yabahloull herouh’, theya mammeχ is tenna. Hemizrag’t hella heffer ar’i ennes. Mani d ousin inijiouen r’er tmizrag’t, houchasen ar’i; etchin ih’abba (2) , ernin elkhobs, d’eldjouz, d’ouχsoum; assid’in ouiiren r’er tabahloult. Herouh’ nettath atchaour hemizrag’th; hennas mata ad’oucher’ inijiouen? Hennas ouch asen ar’iai n ih’ebba d’ikhsan, d’elferch (3) eldjouz. Atrouh’, heya amma inijiouen, nehni ouiiren our etchin che.

 

Elmerret ticht, henna hemizrag’th i hbahloult : Arouah’ anniy hik’ellabin (4) annet’t'ef d’isen hisχrin. Et’t'efent sent en tsχrin, ououinhen r’er thado dar ensen. Habahloult henna i hemizrag’th : Mammeχ asen n saoua ? Hennas houchasen himek’k'ith em ouaman, hernasen k’itch em ouari, himerd’in ad’oummen. Therouh’ habahloult, hesaoua amma. Hemizrag’th her’eres hasekkourth ennes, heks as ad’an ennes, theyit d’i hak’emmoucht, heya d’is aman, d’elbeçol, d’ifelfel, ettisent (5), ettichert, hesserr’ elâfith, hesaoua haberbouch (6), hetcha nettath ettaroua ennes. Emmis en tmizrag’th iria irfed’ ak’ebbal (7) em ouχsoum d’oug fous ennes. Emmis en tbehloult izrith, iouella r’er immas, innas : Aouiianer’ d’amensi ennar’ bach annetch aχsoum en tsekkourth ennar’. Hennas iemmas : Rouh’, aoui d’ hasekkourth. Ametchouχ irfed aseχsaχ (8) an, naχ hasekkourth d’i hak’emmoucht hetraâ (9) d’is. Isiouel as innas : A imnia, atta hasekkourth hetraâ d’istitt’aouin ennes. Hek’k'ar as : Ekkes aseχsaχ. Iekkes aseχsaχ, asekkourth toufi. Hessers d’ig ikhf n hessejereth tigith, a tet’sen d’oug allar’ ennes ar d’ouχsel, d’iilef, d’ifis, d’ouchhen, etted’mouth (10), tgerzizt, d’oud’bir, d’ouazedhoudh, taberroggalt (11).

 

D’oug ammas en iidh, theh’ouadj hasekkourth attebzodh; hebzodh, heidhou hemek ‘k’ith fi ikhf em ouar. Innasen iioud’an ennes: Herieth, hek’k'elem ma hetchath cha elgerreth (12). Iria ouχab, innas : Ajenna hath imlel am elouber (13) inou. Iria ouedbir, innas : Ajenna addaziza am thiť inou. Iria ouchchen, innas : Addaberbach (14) am ouzaou inou. Innas ouar iχet’ t’oufth Ali r’er ikhf en essejereth. Houli χet’t'oufth, houfa hasekkourth houella tamet’t'outh s ouâddis (15).

 

D’eg agg ouli ouas ekkeren louh’ouch ad’rouh’en ad’serh’en (16). Ibek’k'im hagerzizth henna : Our eggourir’ cha ad’erthâr’. Haχet’t’oufth hek’s as segg ikhf en thafed’ent, heidhou hamet’t'outh imezzek’(17) oudddis ennes iried sis oumetchouχ iedder. Het’fith hagerzizt hefferith, assid’in het’ t’ef thas’ers ihamet’t'outh, hebbit hesemmouit. D’eg ad’rouh’en elouh’ouch heferk’asent (18). Oukoull etchin essis men k’ell (19) agerzizih, heffer essehm ennes. Ouchchen izra ametchouhχ, our iekhs ch ad’irouh’ ad’ irthâ. Hennas hagerzizth : Rouh’ atterthâdh ak oucher’ essamhinou. Iouiir ouchchen. Houiir agerzizt r’er oumetchouχ, heyas arχas d’oug oudhar ennes, thennâs, ouiir, r’areχ attesoudh ald atterouidh.

 

louiir oumetchouχ ikhold hsouf, isoua aldi g eroua. Eriin as ouchchaoun d’eg ikhf ennes am iya en ted’emouth. leya arχas d’eg ikhf em ouchchaoun ennes. Heried oultemas, netta innas : K’a r’a r’a r’a, ia Aicha, ia oultema. Herouel oultemas ; innas : A Aïcha, k’a r’a r’a r’a, netch d’oumam. Theria oultemas, therouzzi r’ef bab en terak’ith a iχerzen sel’henni (20). Houfa iidj ek’K'aren as Serdeslas, netta d’aseh’h'ar’ (21). Herchelith. Imerd’in theh’ouadj attenr’ oumas. Hennas i Serdeslas: R’im d’eg imi ouiddid. Iouiir netta iouella d’fir’er. Henna Aïcha i oumas : Rouh’ ouezza aman. Irouh’ ioula Serdeslas d’eg imi ouiddid, ik’ar as : Mata hatsaouidh da. Innas : Elh’al ihma, netch ek’K'imer’ d’ilebroud. Innas : Eri (22) bach ad’ouezzar’ aman. Hennas d’âil ennes : Rouh’ effer iman enneχ, d’elleh’af (23) inou. Imerd’in hennas ioumas : Rouh’ sired’ai elleh’af. Iouiir ieyra elleh’af d’oug aman. Izra Serdeslas ioutth soudebbous (24) d’oug aman, inr’ith.

 

Imerd’in iouella. Hennas oultemas : Lar’a (25) dkhaleχ (26) ad’ietch ameχli. Inna : Khali netta d’baba. Hek’k'ar as : Mata hek’k'aredh babaχ, netta d khaliχ. Innas : lemmouth. Hennas : Mani illa ikhf ennes? Ik’ar as : A netch edjir’th. Netta iskerχous, irfed’ ikhf ennes eddous. Ieyra ikhf oufir’er doug ouberbouch. Oultemas hetcha aberbouch nettath hemmouth.

 

Imerd’in iria ad’ ikhdem anilti hamet’t'out h hellan ikheddem r’ares hennas i ouriaz ennes : Annenr’ akhelidh aia. Innas : Ad’etcha annerh’el (27) annessers d’ig ikhf our’ezdis, annessers ametchouχ d’oug ousakou (28) d’i eher’ma. Hennas : Mata ha nâdel (29) d’i her’ma in. Innas : Anniy hagechchoult (30) en telousi. Reh’len r’er tenezzaχt, d’egga g essoules, essersen d’eg ikhf our’ezdis. Hennas hamett’outh iourgaz ennes : Eiy hametchouχ d’i thar’ma ousakou d’eg ikhf our’ezdis, d’ira hannekker ah neyer Elbaâd oumma et’sen. Ikker houmetchouχ idhren sakou iouâ har’ma en telousi fi ikhf our’ezdis, ieffer iman ennes d’oug oumχan en telousi iyni sakou fi iman ennes. Argaz etmet’t’outh mani ekkeren ennan : Imira iet’t'es ah niyr. Fetχen (31) sakou, d’efaân (32) hagechchoult fi ikhf our’ezdis. Hanezzaχt ekkeren dhebbek’en (33) akhkham reh’len. Doug oubrid hametchouχ ikholdh ith oubezzidh, ibzodh d’oug ousakou. Hamett’outh henna iourgaz z ennes : Eddehan (34) ennar’ ibd’ou ifessi. Houch afous ennes attedehen essalef (35) ennes; imdi (36) ourgaz ennes ak netta fous ennes ad’idhen iyri ennes,

 

D’eg idh essersen akhkham, fetχen sakou ad’eksen helousi ad’iyin amensi. Oufin ametchouχ d’oug oumχan en telousi aidhen fellas aldi g erouel. loufa thamr’arth innas : Achem khedmer’ ellir’ fellam d’akhlidh. Hennas : R’im. D’ira irouh’ israh’ ous toutcha amr’arth ar’eroum la bas. Netta ad’iouyir ad’iaoui essâith r’er iidjem oumχan si henezzaχt aldi sialles; essâith treoueh’ hellouz. Hennas hamr’arth : Essâith hatta in heroueh’ hellouz. Innas : Mammeχ tsaouidh d’oug ar’eroum tsaouir’ amt d’i essaith. Hennas hamr’arth : Ouiir. Iouiir netta la bas siiai aldi g ikhlodh haddarth en d’addas. Innas : Aoui iai r’er essolt’an ellejnoun, bach a issek’ran (37). Gag ik’ra souasoua, iouella r’er d’addas. Innas : Aouiiaï r’er essouk ad’ ouellir d’aserd’oun ouai thezenzedh r’areχ, attaouidh algam (38).

 

Hououith r’er essouk’ hezzenzith is, issolt’an ellejnoun. Hettou algam. Solt’an ellejnoun iououi aserd’oun r’er throuint, ieks as algam bach ad’isou. louella imerd’in d’ametchouχ, iroueh’ r’er d’addas, ik kim r’ares aldi g emmouth.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Transcription en chaoia et traduction de Gustave Mercier

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1. Ce conte est écrit dans le dialecte des Oulad-Daoud.

 

2. Arabe حبّة, qui désigne un grain, et aussi une unité de produit quelconque : datte, orange, etc. Les Beni bou Sliman disent tiyeni, une datte.

 

3. Racine arabe فرش, couvrir, couverture; mais ce mot ne s’emploie pas en arabe dans le sens du texte. On dirait قشر, des coquilles.

 

4. Arabe قلب, retourner, renverser.

 

5. Pour eď tisent.

 

6. Arabe بربوشة : Sorte de couscous grossier, souvent fait de farine d’orge.

 

7. ak’ebbal désigne à proprement parler un bâton. Ce mot est pris ici dans le sens de morceau.

 

8. Arabe كسكاس, marmite en terre, percée de trous dans le bas, pour cuire le couscous à la vapeur.

 

9. Arabe راعى, observer, considérer. En Chaouia, regarder.

 

10. had’mouth, la gazelle. En arabe vulgaire ادمي , gazelle de montagne, dérive peut être de la racine berbère. Tamachek : Ʃ, edemi, gazelle de grande taille.

 

11.taberoggalt, le merle, de aber, particule par laquelle commencent souvent les noms de fleur et d’oiseau, et roggal, noir.

 

12. Arabe vulgaire القرّة, le mauvais temps.

  

13. Arabe الوبر , le poil.

 

14. aberbach, gris, proprement tacheté de diverses couleurs. Arabe vulgaire مبربش, criblé, moucheté. Synonyme مزرقت. Le mot aberbach fait quelquefois partie de noms propres. Ainsi l’on dit : Mh’and aberbach, M’hammed le gris. De même que l’on dit : M’hand aroggal, M’hammed le noir; Mh’and azeroual, M’hammed le bleu (aux yeux bleus), etc.

 

15. s ouâddis, enceinte; mot å mot: avec son ventre. De même, en arabe vulgaire, on dit بکرشها

 

16. Arabe سرح , paître

 

17. Arabes مزّق, déchirer.

 

18. Arabe فرق, partager.

 

19. Arabe من قلّ . On dit plus ordinairement من غير .

 

20. Arabe حنّة ,plante dont les feuilles servent á teindre les doigts en rouge.

 

21. Arabe سحّار, magicien.

 

22. Les Beni bou Sliman disent eried, sors.

 

23. Arabe لحاف , couverture. Le vêtement des femmes se dit ملحفة .

 

24 . دبوس matrague .

 

25. لاغى, appeler.

 

26. خال , oncle maternel. Ce mot est employé ici dans le sens de beau-frère.

 

27. Arabe رحل , changer de campement.

 

28. En arabe تلّيس , sac double en grosse laine que l’on place sur le mulet, une de chaque côté.

 

29. Arabe عدل .

 

30. hagechchoult, detite outre où l’on met le beurre, en arabe شكوة , par opposition à aiddid, grande outre, arabe قربة .

 

31. Arabe فتح ; remarquer la transformation assez curieuse subie par le ح ,qui parait étranger au génie de la langue berbère.

 

32. دفع

 

33. Arabe طبّق , plier.

 

34. Arabe الدهان , le beurre déjà ancien; teloussi, le beurre frais.

 

35. السالف , boucle de cheveux tombant sur les joues.

 

36. Arabe يمدّ .

 

37. Arabes قرى , lire.

 

38. اللجام , la bride.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 




Histoire de Constantine

17102020

 

 

 

 

 

 

 

 

Histoire de Constantine dans Littérature 200626085526142652

Dar oum noun, lieu de naissance d’Ahmed Bey.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voici une des histoires contée par les Maures de Constantine.

 

Sous le Bey Manamani*, il y avait, dans la ville, un jeune homme qui se vantait d’avoir beaucoup d’amis, et qui tournait son père en ridicule parce que celui-ci n’en avait qu’un. Le vieillard résolut de lui donner une leçon. Il s’en fut au marché, fit emplette d’un mouton, l’égorgea, le dépouilla et le recouvrit d’une pièce de toile; puis il dit à son fils : J’ai eu le malheur de tuer un homme ; va, cours chez tes amis, demande-leur de nous assister.

Le jeune homme part et frappe à toutes les portes ; il ne trouve que des gens effrayés qui tremblent de se compromettre; il en restait un sur lequel il comptait beaucoup ; ce fut celui qui le trahit. De retour au logis où il revenait tristement, le père lui dit : Mon fils, tes nombreux amis t’abandonnent; essayons donc du mien, envoyons-le chercher. L’ami arrive en toute hâte ; il s’informe, et le père fait son conte : Quoi, dit-il, n’est-ce que cela ? Nous ferons deux parts du cadavre, et chacun en emportera la moitié. Non, dit le père, il vaut mieux l’enterrer sous cette Voûte obscure. Le travail était à peine achevé qu’on frappe à la porte de la maison. C’est un topdji qui vient arrêter le coupable. Le père se laisse emmener sans résistance et comparaît devant le Bey : On t’accuse, dit le prince, d’avoir commis un meurtre : qu’as-tu à répondre?

 

Seigneur, dit le père, excusez-moi, je suis innocent.

Prends – garde, reprend le Bey avec sévérité, d’aggraver ton crime par un mensonge. J’entends que le cadavre soit retrouvé sur-le champ.

 

On le ramène chez lui, et les perquisitions commencent. Le topdji remarque, sous la voûte, un endroit où la terre avait été fraîchement remuée , il l’écarte et découvre un linge ensanglanté. Alors l’ami s’écrie : C’est moi qu’il faut punir, je suis le seul coupable ! Le topdji, embarrassé, les arrête tous les deux, et les mène au palais. On enlève le linceul , et le Bey, surpris, à la vue d’un mouton dépouillé : Que veut dire ceci ? s’écrie-t-il. Seigneur, répond le père, Dieu me garde de commettre un crime ! J’ai Voulu donner une leçon à mon fils, en lui montrant combien les Vrais amis sont rares. Alors il lui raconta tout, et le prince, admirant sa sagesse, le renvoya comblé de présents, tandis que le jeune présomptueux essuyait les railleries des assistants.

 

 

 

 

 

 

* Mohammed-Bey-Malamli , ou Mohammed-Bey-Manamanni de son nom Mohammed-Bey Ben-Khan (en arabe محمد محمدي باي بن خان) calife et caïd-ech-chair, caïd-djebel-el-renem, d’origine turque, est un bey de la province de Constantine, qui règne de décembre 1824, à fin juillet 1826 (1241 de l’Hégire)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 




Du Nom des Énigmes en Kabyle

31072020

 

 

 

 

 

 

Du Nom des Énigmes en Kabyle dans Littérature 200607081114638471

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Selon les différentes localités kabyles, une douzaine de termes sont employés encore aujourd’hui pour désigner les énigmes.

 

 

 

1 – Tamsaɛreqt (pl. timsaɛraq, timsaɛraqin, timsɛraqin): «celle qui égare», du verbe aɛreq: «s’égare», «échapper(s)», «se tromper», «ne pas deviner», «disparaître», «cacher», «ne plus se rappeler».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2 – Tamsefruţ (pl. Timserfa): «celle qui explique» du verbe efru: «expliquer», «résoudre», «terminer», «séparer les belligérants», «ramener la paix» (tifrat = paix), «tirer».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

3 – Asefru désigne également le poème ou une composition rimée charge d’un sens ésotérique à l’attention des esprits sagaces.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

4 – Taqnużt (masc. Aqnuż, pl. Tiqwnaż, iqwnaż) est à l’origine, un jeu de dames dans lequel deux joueurs déplacent 24 pièces (12 x 2) sur un plateau (une pierre plate) carré, divisé en 144 cases. Nous l’avons trouvé sous le nom de tiddas et de damma (lat. damina?). verbe qwennez: «jouer aux dames», «gagner la partie».

 

Qqunneż «donner sa langue au chat» (au jeu des énigmes) et Squnneż «faire donner sa langue au chat» (toujours au jeu des énigmes) sont les formules qui permettent au sphinx d’additionner des «points d’échec» (iqwnaz). Aqnuż c’est le point, c’est une partie gagnée. À ne pas confondre avec aqennuż qui signifie «embarras», «gêne», «complication», «boule dans la gorge» (angoisse: «il m’a laissé dans l’embarras» (yeğğa-yi-d aqennuż). Cela signifie aussi «grumeaux», «bosse», «grosse bouchée», «boule», «boulette».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

5 – Tamesbbibbit (pl. Timesbbibbay) qui est l’origine également d’un toute autre jeu d’enfants et d’adolescents: les joueurs (jeunes des deux sexes) font cercle accroupis. Ici, le sphinx s’appelle «le hibou» (bururu), car il a les yeux bandés.

 Chacun des joueurs choisit un nom d’animal. Le jeu consiste à transformer sa voix de façon à ce que le «hibou» ne la reconnaisse pas. S’il reconnaît «l’animal» ou «l’oiseau» qui vient de parler, celui-ci le remplace en portant à son tour le bandeau du hibou, non, sans avoir auparavant porté «le hibou» sur le dos (ibbibbi) d’où le nom tamesbbibbit «celle (jeu) où l’on se porte sur le dos». il est aujour’hui un simple jeu d’enfants qui consiste, à «se porter sur le dos» (timbibbit). Dans le jeu des énigmes, on retrouve le verbe Bbibb dans plusieurs formules: «Je te charge!» (A-k sbbibbeɣ!), dit le sphinx à l’un des joueurs qui donne sa langue au chat. «Je donne ma langue au chat!» (Aqnuż!)

 

L’Oedipe ajoutera: «Charge-moi!) (Sbbibbi-yi!). Le sphinx dit, par exemple: «Porte-moi jusqu’à Bougie des ancêtres».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

6 – Tamɛayt (pl. timɛayin), c’est l’histoire plaisante l’anecdote à sens amusant ou moral; une parabole, un proverbe ou une mésaventure: «J’ai vécu une mésaventure» (Tedra felli-i tem₃ayt).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

7 – Taqsiţ (pl. Tiqsidin) est en fait la petite histoire, l’anecdote amusante, le court récit (de l’arabe elqissa?) .

 

 

 

 

 

 

 

 

 

8 – Tamacahuţ (pl. Timucuha), c’est le conte, l’histoire merveilleuse qui par extension s’applique aussi à l’énigme. Par le masc. (amacahu) on désigne aussi, «le mythe» (izri). A-macahu! «Ô conte! Ô mythe!» est la formule pour annoncer le commencement d’un conte ou d’une énigme qui signifie «il était une fois» .

 

 

 

 

 

 

 

 

 

9 – Tamacahuţ usefru (pl. Timucuha usefru) ou encore asefru n tamacahuţ (pl. Isefra n tmacahuţ) sont les structures sous-jacentes qui forment la combinaison du 3 et 8 ci-dessus qui, littéralement, veulent dire «conte de poème» (conte rimé) et «poème de conte» (poème conté).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

10 – Tamkersuţ (pl. Timkersa) «celle qui est nouée», du verbe ekres «faire un nœud», «compliquer, rendre les choses difficiles»: «La situation m’est difficile» (Tekres fell-i teswiɛt). «Il a ridé sont front», il boude (Ikres tawenza-s/ anyir-is). «Mon sang s’est noué»: J’ai des varices (Kersen idammen-iw).

 L’énigme est donc perçue comme «un nœud» (tiyersi) qu’il faut défaire, pour trouver la solution.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

11 – Tamsaɛwweqt (pl. Timsaɛwiqin) «celle qui gêne», du verbe «gêner», «embarrasser» (saɛwweq). «Être gêné», «être embarrasé» (ɛawwqeɣ), «Il m’embarrasse» (iɛewweq-iyi), «Je ne sais comment faire avec lui» (ɛawwqeɣ deg-s)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

12 – Tameckalt (pl. Timeckalin) «celle qui entrave», du verbe «entraver de liens» (cekkel). Nous retrouvons la même idée qu’au niveau de 10 et 11. Cckal signifie aussi «patte», «attache», «empêchement» et «sûreté d’une arme à feu».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

13 – Tamcellakt (pl. Timcellakin) «celle qu’il faut deviner» du verbe «deviner» (cellek). En fait, c’est le terme qui désigne la devinette même. Comme il a été dit plus haut,en acquérant ses lettres de noblesse comme genre littéraire oral, la devinette a laissé place à «l’énigme» (tamsaɛreqt). Tant est si bien que l’énigme a fait oublier la devinette (tamcellakt) .

 

 

 

 

 

 

 

Source: La langue et la mémoire de Youcef Allioui 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 




Yali. Le Soufi – Conte Persan

26042020

 

 

 

 

 

 

Yali. Le Soufi - Conte Persan  dans Littérature 200320095157280968

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Un soir que Yali, le pauvre soufi, avait résolu de s’offrir un bon repas et de faire cuire un vieux corbeau qui était venu mourir près de sa cabane, il alla emprunter une marmite à l’un de ses voisins.

 

Le lendemain, il lui rapporta l’ustensile, auquel il avait attaché un récipient plus petit, en témoignage de sa gratitude. Par discrétion, il dit :

Ta marmite a eu cet enfant qui t’appartient.

 

L’homme remercia sans poser la moindre question sur cette naissance extraordinaire.

 

Quelques jours après, Yali qui voulait se régaler d’un poisson qu’il avait trouvé dans les détritus du marché, alla encore emprunter la marmite. Comme vous pensez, son voisin s’empressa de la lui remettre.

 

Une semaine s’écoula. Très inquiet de ne pas avoir revu son bien, l’homme frappa à la cabine de Yali et se nomma.

 

Au bout d’un instant, le soufi, en larmes, ouvrit sa porte.

 

Pourquoi pleures-tu ? entendit-il.

 

Quel malheur est arrivé ?

 

- Ne m’en parle pas ! Un malheur épouvantable. Ta marmite est morte.

 

Morte ! Une marmite ? Voleur, bandit, rends-la moi tout de suite !

 

Yali écarquilla les yeux.

 

- Comment ! fit-il. L’autre jour, tu n’as pas douté qu’elle avait eu un enfant et, ce matin, tu ne veux pas croire qu’elle est morte ?

 

 

Las de ses austérités. Yali s’était marié. Je crois, plutôt, qu’il avait pris, cette décision pour s’infliger de nouvelles épreuves, car sa femme était laide et méchante. Pour comble, elle était vorace. Elle engouffrait toujours la part de nourriture qui revenait à son mari. En désespoir de cause, le soufi allait errer au marché, où il réussissait, quelquefois, à se faire donner des fruits. Un matin, apitoyé par sa maigreur, un boucher lui donna trois livres de belle viande. Au lieu de garder son aubaine Yali la remit à sa femme.

 

- Puisque la chance me favorise aujourd’hui, dit-il, je repars, afin d’essayer d’attraper quelques légumes. Ne m’attends pas pour attaquer ce morceau de bœuf, mais garde-m’en la moitié.

 

Lorsqu’il revint, sa femme ronflait, répandue sur leur couche. Il la réveilla.

 

Je vois que tu as bien mangé, déclara-t-il. A mon tour, maintenant ! Donne-moi ce que tu m’as réservé.

 

Elle gémit :

- Hélas ! je n’ai pas touché à cette viande, pour la bonne raison que le chat s’en est emparé et l’a engloutie.

 

Yali prit le chat qui dormait dans un coin. Il l’emporta vers une balance et le pesa gravement. Le fléau de la balance indiqua trois livres.

 

Dis-moi, femme, s’écria le soufi. Si c’est le chat que je suis en train de peser, où est la viande ? Si c’est la viande, où est le chat ?

 

 

 

 

 

 

 

Saadi. (le Jardin des Roses ; traduction de Franz Toussaint).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 




Poésie Berbère: Chants Rituels et Chants du Travail

17032020

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La poésie, chez les Berbères d’aujourd’hui, est surtout une distraction. Néanmoins, elle a conservé un important rôle social, particulièrement net en certaines circonstances. Il suffit, pour s’en convaincre, d’observer la place que tiennent dans la vie des Berbères marocains les danses mêlées de chants, qui sont leur divertissement national à tous, depuis le Rif jusqu’au Tazeroualt ; ou dans la vie des Touaregs, l’ahal qui en est l’équivalent moins barbare. Ces réjouissances ont lieu nécessairement à chaque fête, quelle qu’elle soit ; elles accompagnent chacune des grandes étapes de la vie humaine, marquées déjà quelquefois par des chants spéciaux et en quelque sorte rituels.

Ces derniers chants sont souvent de très anciennes formules qu’on répète depuis des générations, quelquefois sans plus en saisir le sens, et en les déformant de plus en plus. Il est certains chants qui accompagnent la circoncision, chez les Berbères marocains, et qui sont aujourd’hui complètement incompréhensibles ; il en est de même de quelques formules que l’on prononce lors des fêtes saisonnières. D’autres fois, le sens est encore clair ; c’est le cas, notamment, des chants de noces, au milieu desquels on conduit la mariée à son nouveau domicile, ou par lesquels, à un moment quelconque de la cérémonie, on souhaite une inaliénable prospérité au nouveau ménage ; il s’y mêle parfois des souhaits ironiques et quelques injures, ainsi qu’il arrive la plupart du temps chez les Berbères marocains dans les poésies qu’hommes et femmes s’adressent les uns aux autres.

 

Au reste, ces morceaux ne semblent pas très différents des autres, plus archaïques seulement quelquefois ; ils donnent souvent l’impression d’être des poèmes qui, ayant plu particulièrement, ont été répétés volontiers et sont devenus rituels en certaines fêtes, soit qu’ils eussent été faits pour l’une d’entre elles, soit qu’ils s’y adaptassent naturellement assez bien.

Voici, par exemple, celui que – chantent, chez les Aït Ndhir du Moyen-Atlas, des gens qui vont, au cours des fiançailles, porter les cadeaux des deux familles l’une à l’autre :

« Si nous l’avions pu, nous t’aurions offert des réaux dans le pan du burnous, ô toi qui donnes la fête.

« Si nous l’avions pu, nous t’aurions ‘offert une chamelle : la brebis que voici est un simple souvenir.

« Si nous l’avions pu, nous t’aurions offert une chamelle suivie de son petit.

« Si nous l’avions pu, nous t’aurions offert des réaux ; toutes

les belles auraient montré leur visage ».

 

 

Le trait est mordant : les Touaregs, en semblable occurrence, sont plus galants. Au moment où, dans leurs fêtes de mariage, on amène la mariée à son époux, commence entre le chœur des hommes et le chœur des femmes un bref dialogue chanté, dans lequel les hommes s’engagent à protéger leurs compagnes :

« Nous avons faim! — Vous mangerez.

« Nous sommes nues ! — Vous serez habillées.

«Nous sommes à pied ! — Vous serez montées….

 

 

Que quelques-uns de ces poèmes n’aient pas été composés spécialement pour le genre de fêtes auquel l’usage les a attachés après coup, c’est ce qui apparaît évident à lire celui-ci, d’ailleurs fort beau, que les jeunes filles des Aït Temsaman du Rif aiment à chanter lors des mariages ; intentionnel, il serait de bien mauvais augure ou d’une ironie déplacée, car ici exprime les plaintes d’une jeune femme amoureuse de son cousin et mariée contre son gré à un vieillard.

 

A lalla ! a lalla ! a lalla bouiani !

Je ne pardonnerai pas à ma mère qui me mit le henné.

 

A lalla ! a lalla ! a lalla bouiani !

Je ne pardonnerai pas à mon père qui m’a mariée à celui-ci.

 

A lalla ! a lalla ! a lalla bouiani !

Il m’a mariée à un veuf, m’empêchant d’épouser un jeune homme.

 

Ihé a lalla ! a lalla ! a lalla bouiani !

Il -m’a donnée à un vieillard aux veines du cou noueuses.

 

Ihé a lalla ! a lalla ! a lalla bouiani !

Sa barbe ressemble à une poignée d’alfa.

 

Ihé a lalla ! a lalla ! a lalla bouiani !

Son ventre à un fond de sac de blé.

 

Ihé a lalla ! a lalla ! a lalla bouiani !

O Mouh’ (Mohammed) ô Mouh’ ! ô mon cousin germain !

 

Ihé a lalla ! a lalla ! a lalla bouiani !

O Mouh’ ! ô Mouh’ ! au visage si pur !

 

A lalla ! a lalla ! a lalla bouiani !

Nous fuirons par une nuit sans lune.

 

A lalla! a lalla ! a lalla bouiani !

A ton cou, ô mon ami, que peut-il m’advenir ?

 

Ihé a lalla ! a lalla ! a lalla bouiani !

O Mouh’ ! ô Mouh’ ! ô parfait cavalier !

 

Ihé a lalla ! a lalla ! a lalla bouiani !

Porteur d’une cordelette en poil de chameau enroulée autour de

 

la tête ! ô mon frère ! je meurs pour toi !

 

 

 

A côté de ces chants de fêtes, il en est aussi de deuil. Les voceratrices de Corse sont célèbres : celles des Berbères mériteraient de l’être. C’est une coutume fréquente en Berbérie, lorsqu’un guerrier est tombé face à l’ennemi, que son éloge funèbre prononcé par quelques femmes, vieilles le plus souvent. Ce sont des improvisations en phrases rythmées ; des lamentations entrecoupent dénoncé des vertus du mort ; on rappelle ses hauts faits ; on s’apitoie sur le sort de ceux qu’il laisse. Beaucoup de formules dans tout cela, ce qui facilite le travail d’improvisation ; beaucoup de convenu et d’apprêté ; néanmoins, parfois, le cri d’une douleur sincère, quelque tragique accent d’une âpre beauté. Et surtout l’on s’étend longuement sur les circonstances dans lesquelles le défunt a trouvé la mort :

 

Il n’a pas laissé son pareil,

il était homme d’an grand courage ;

il était brave et jamais craintif :

s’il avait été lâche comme un Juif, on ne serait pas allé le chercher,

Pieux, il priait ; agriculteur, il plantait :

charitable, il faisait l’aumône en argent ou en pain.

Labourait-il ? Il en tirait une récolte suffisante pour lui ;

s’il faisait moudre, un produit abondant en était le résultat.

Se mettant en selle sur son -cheval, il prit son fusil,

ainsi que la. corne dans laquelle se trouvait de la poudre.

Au sujet de l’eau, une dispute s’engagea entre les Arabes

et les Imazighen (Berbères) qui avaient toutes les raisons.

….Dès, le point du jour, on assembla cavaliers et fantassins ;

on ne laissa que ceux qui sont infirmes.

Tous les cavaliers, munis de leurs cornes remplies de poudre et de balles,

se dirigèrent en galopant vers le lieu du combat.

Les fantassins prirent les armes ; chacun était armé à sa façon ;

les uns s’étaient munis d’une barre de moulin ;

d’autres, d’une faucille avec laquelle on moissonne ;

un autre portait son fusil sur son épaule.

Certains ne prirent que de longues et grandes serpes ;

d’autres portaient sur l’épaule leur bâton de jet,

ou se munirent de la pince avec laquelle on perfore les murs.

…Seul d’homme tué ne Tevint pas.

Lui et son cheval manquant,

la mère alla s’en informer

auprès de tous les cavaliers qui avaient pris part au combat, en leur demandant : « Où est mon fils ? »

Ils lui répondirent : Que Dieu le bénisse, Madame !

Votre fils est mort ainsi que son cheval.

…Dans la nuit [les gens] partirent à sa recherche ; ils le retrouvèrent

étendu par terre avec le crâne fracassé.

Ces hommes le ramassèrent et l’attachèrent avec des cordes

Sur un cheval, où ils le fixèrent solidement ;

et pendant que l’on conduisait la bête par la bride,

les autres la suivaient par derrière,

Ils ramenèrent ainsi le mort, revinrent jusqu’à sa maison ; ils frappèrent à la porte.

La mère sortit, ainsi que les enfants du défunt.

A la vue du cadavre, des cris s’élevèrent (1)

 

 

 

Ces oraisons funèbres peuvent être faites aussi par des poètes ; mais alors, ce n’est plus en présence du mort : ce sont des consolations adressées à sa famille :

 

« Bel ‘Aïd, son cadavre se décompose (dit le raïs, en s’adressant à la femme de ce personnage), pourquoi pleurer, ô beauté sans pareille ? La fleur du basilic est morte ; nous en planterons une autre ! » (2).

 

 

 

Bien des actes ordinaires de la vie s’accompagnent de chants : il est des berceuses pour endormir les enfants ; il est des formules poétiques que ceux-ci chantent dans leurs jeux (3). Il est aussi des chants de combat, des chants que l’on entonne en marchant à l’ennemi. Ce sont des cris de guerre rythmés et traditionnels. Ils sont fort courts, consistent en hurlements suivis d’invocations à un saint, et de quelques formules sans grand sens, mais de consonance rude, destinés à terrifier l’adversaire.

 

 

Tous les Berbères ne les possèdent peut-être pas ; chez les Rifains, belliqueux entre tous, ils sont bien caractéristiques :

 

Aiouâ-â-ââ

La rivière est en crue, en crue, en crue, pleine de pommes !

Honneur à la fête de Sidi bou ‘Cha’ib-ou-Neftah !

 

 

Traduire de tels textes, c’est forcément les trahir, beaucoup plus encore que les autres. Ils ne valent que par leur sonorité. Si durs, si rauques que nous choisissions les mots français, ils ne sauraient imiter le tonnerre des syllabes berbères. Gomment rendre toute la sauvagerie de ce chant de guerre, d’une belle allure barbare, que les Aït Temsaman hurlent à pleins poumons en courant sus à l’Espagnol :

Ouia-â ! ouia-â ! aia-â-â-â !

La poudre est brûlante, ô mes frères !

Mesurez, mesurez la poudre ! O Mouh, ô ‘Omar! ô mon frère !

La pièce d’argent et le réal de dix [mithqal, nous les aurons]

‘Ali bou Ghalem, flambeau des Jbala !

 

 

Et puis, il est aussi toute la grande catégorie des chants destinés à accompagner le travail. Ceux-là, nous les trouverons surtout chez les femmes. Non que les hommes méconnaissent la valeur du chant pour rythmer l’effort : l’on conserve indéfiniment dans l’oreille, si l’on a habité une ville musulmane, le chant allègre et pourtant monotone des pilonneurs de terrasses, le chant dont chaque temps est marqué d’un sourd coup de dame. Mais ce sont d’assez courtes formules, indéfiniment répétées, et le plus souvent des formules pieuses ; elles célèbrent la grandeur— et, même en pays berbère, le font en arabe — d’un saint musulman. Il en est de même quand les hommes chantent en chœur dans les travaux des champs, ce qui n’est point très fréquent. Combien plus intéressants nous apparaissent les chants des femmes, tenus par les hommes en un dédain ‘profond, qu’ils sont loin de mériter toujours. On les entend dans la campagne, quand les femmes ramassent les herbes et le bois mort ; et quand elles sont nombreuses, elles forment des chœurs qui se répondent. Mais c’est surtout au petit matin qu’ils s’élèvent, quand, dans l’aube à peine blanchissante, monte de toutes parts le ronronnement sourd des moulins à bras, dur travail par lequel la femme prélude à sa journée de labeur : il n’est pas bon de moudre la farine à la grande lumière. L’air en est monotone et triste infiniment : le chant est une interminable complainte dont chaque femme, tour à tour, reprend un couplet ; ou bien ce sont de courtes formules, sans signification bien précise, que l’on répète à satiété. On y trouve souvent quelque invocation musulmane ; c’est souvent aussi quelque izli que la femme a retenu et qu’elle récite sans se lasser, après lui avoir adapté un air : izli et air sont parfois de sa composition :

« Mon Aïcha, ô ma fille, ne pleure pais ; ton père n’est pas encore mort :

c’est son cheval qui a été tué au combat ».

 

« Ma chère mère, qu’ai-je besoin du thé de Tassourt (Mogador) ;

le juif en boit, il ne peut être celui des honnêtes gens » (4).

 

Ces deux chants viennent du Sud marocain ; ailleurs, ils ne sont pas très différents. Les poèmes chantent les héros disparus : la tristesse des paroles s’allie à la tristesse du chant. Hanoteau (5) nous a conservé la complainte de Dahman-ou-Meçal, que chantaient, en tournant leurs moulins à bras, les femmes de l’Oued Sahel, en Kabylie : c’est l’histoire d’un jeune Kabyle qui blessa un officier du bureau arabe de Sétif, fut pris et fusillé à Bougie :

 

 

«… L’eau de la fontaine est fraîche : le chrétien en a bu au pays. O douleur ! Dahman est mort dans la soirée.

« L’eau de la fontaine est glacée : le chrétien en a bu debout.

« Je plains ton roi, ô beau jeune homme à la taille élancée.

« L’eau de la fontaine est chaude : le chrétien en a bu en sécurité. O douleur, Dahman a servi de cible.

« ..,..Dahman pleure dans le vestibule : « Sauve-moi, ô Sidi Chérif ! — Non, je ne te sauverai pas : tu as blessé le capitaine de Sétif ! »

« Dahman pleure sur le seuil : « Sauve-moi, dame aux vêtements éclatants ! — Non, je ne te sauverai pas : tu as blessé aujourd’hui le capitaine. »

« Dahman pleure dans la chambre : « Sauve-moi, ô Lalla Taous ! — Non je ne te sauverai pas : tu as blessé le capitaine à l’os. »

« Dahman pleure sur la thakenna : « Sauve-moi, ô Lalla Dhrifa ! — Non, je ne te sauverai pas : tu as blessé le capitaine aujourd’hui. »

 

 

Et la complainte se poursuit sans fin. Elle est bien typique. Cette répétition de vers presque semblables, arrivant comme une sorte de refrain désolé, en accentue encore le caractère. Mais les paroles importent-elles beaucoup ? Ce qu’il faut dans ces chants du moulin, c’est la monotonie du rythme, accompagnant la monotonie de l’effort. C’est cela même qui les rend lugubres; l’esprit des femmes, quand elles travaillent, ne l’est point. La Berbère est vaillante ménagère : elle accepte allègrement la besogne de tous les jours; il est rare qu’elle se lamente elle-même sur son propre sort.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(1) Boulifa, Textes berbères de l’Atlas Marocain, p. 76-79. Ces improvisations funéraires sont fréquentes dans certaines régions arabes et arabisées.

 

 

(2) Texte inédit. Région de Tiznit. Bel ‘Aïd était un caïd qui fut tué par les Aït Noummer.

 

 

(3) Ainsi, par exemple:

Danse, danse, bou ‘Arnran.

Je te donnerai des grains de grenade

chantent les enfants des Beni.,Menarer, quand ils voient voler un faucon. Les formules de ce genre sont nombreuses. Cf. notamment Biarnay, Rif, p. 351 (Aït Temsaman).

 

 

(4) Région de Tiznit, texte inédit.

 

 

(5) Poésies populaires de la Kabylie, p. 154-160.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 




Mqidech :Le Personnage Populaire Berbère

6022020

 

 

 

 

  

Le thème du Petit Poucet, c’est-à-dire celui de la lutte d’un enfant chétif, mais rusé, contre l’ogre, ou plutôt ici l’ogresse, dont il finit par venir à bout, est un des plus fréquemment traités dans toute la Berbérie. Il en existe d’innombrables versions, plusieurs même parfois, légèrement différentes, dans la même tribu. Le héros est extrêmement populaire : d’un bout à l’autre de l’Afrique du Nord il porte souvent le même nom : Mqidech, Qeddidech, Biqedech, Biqedich, etc. (Kabylie, Chenoua, Beni-Snous, etc.), Haddidouan (Arabes de l’Oranie, Beni-Snous, Rif, Tazeroualt, etc.). Chacun de ces deux groupes de noms devait correspondre à l’origine à une version différente ; mais les aventures de ces deux héros primitifs ont fini par si bien s’emmêler qu’ils sont devenus aujourd’hui à peu près interchangeables. D’autres noms encore, çà et là, de héros analogues : Baghdidiis ou Medjitata de Ouargla, ‘Ali-ou-Mes’oud de Tamazratt, Hamed Agezzoum des Ntifa, Hammerkejjoud des Infedouaq, etc. Dans ces contes, toutes sorties d’éléments. Les versions des arabisés sont d’ordinaire plus niches, ce qui semblerait indiquer une origine orientale ; mais on trouve aussi dans certaines versions, celle du Rif par exemple, de très nettes affinités occidentales.

 

D’une manière générale, on peut distinguer deux groupes de versions dans cette histoire de la lutte de l’enfant contre l’ogresse. Dans le premier, le héros, comme Petit Poucet, est le dernier né d’une nombreuse famille ; sa petitesse (s’explique par des raisons magiques (1).

 

Les enfants, exposés dans la campagne parce qu’ils ne peuvent être nourris, ou pour tout autre cause, rencontrent une ogresse qui les emprisonne et veut les manger ; ils sont sauvés par la sagesse du dernier. Souvent celui-ci, qui était déjà en butte à l’animosité de ses frères, manque encore d’être victime de leur ingratitude. Parfois le héros du conte est une petite fille, et les frères sont remplacés par autant de sœurs. Un thème un peu différent montre les enfants, au nombre de deux, perdus par suite de la haine de leur marâtre. Ce groupe semble être plutôt celui qui a pour héros Mqidech.

 

Dans le second groupe, l’enfant engage seul la guerre, et délibérément, contre l’ogresse. Chacun a sa maison : l’ogresse guette le héros, dont l’astuce déjoue tous ses pièges et toutes ses fourberies, à sa grande humiliation, jusqu’au jour où il se laisse prendre. Il sert l’ogresse, va enfin être mis à mort pour faire les frais d’un grand repas d’ogres, et juste à ce moment, parvient à substituer à lui la fille de l’ogresse, la lui fait manger, tue les enfants de ses hôtes et se sauve chez lui. La substitution des enfants de l’ogresse, comme dans Petit Poucet, aux victimes désignées est un trait commun aux deux groupes; comme aussi la conclusion ordinaire, qui est la mort de l’ogresse dans les flammes. Le second groupe a plutôt pour héros Haddidouan.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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(1) Thème très fréquent de l’homme qui a sept femmes et sept juments stériles, consulte un magicien qui lui donne sept fruits, un pour chaque femme, et sept baguettes pour frapper les juments : d’où naissance d’autant d’enfants et de poulains. La dernière femme, n’ayant eu qu’une moitié de fruit, et la dernière jument, n’ayant été frappée que d’une demi baguette, donnent naissance à un enfant et à un poulain moitié moins grands que les autres.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 




Touati le grand berger ou Les Contes du Mégris

28122019

Contes traduits de l’arabe- algérien par Albert Lentin

 

 

 

 

 

 

 

 

 Touati le grand berger ou Les Contes du Mégris dans Littérature s-l1600

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Introduction

 

Au nom de Dieu, Maître des Mondes! — Le Clément, Le Miséricordieux ! .— C’est Lui dont nous implorons le Secours ! — Il n’y a de durable que son Empire ! —

 

Il est au nord de Sétif, une montagne que j’aime parmi toutes les montagnes ; on l’appelle le Mégris.

 

Son climat est rude et brutal, son été brûlant ; son hiver vous perce les os. « La iendjem lou-illa ouladou — oua ila fradou » dit le proverbe arabe ; ce qui signifie : « Ne peuvent y vivre que ses enfants ou ses bœufs ! »

 

O Mégris où j’ai vécu, vraiment vécu ! Chers lecteurs puissiez-vous être un jour les « Hôtes de Dieu » à la ferme hospitalière des « Deux Azeroliers » ! Venez, venez, pour le plaisir de vos yeux. Vous verrez des horizons grandioses, principalement à la mort du soleil, quand un sang vermeil ruisselle ,là-bas, vers l’occident, sur les hautes cimes brisées

du Babor. Vous gravirez notre « Tafertast », [petit frère de l’Ouarsenis, cet « œil du inonde » ainsi que l’ont dénommé les Berbères, il est sévère-, il est chauve, il est aride et désolé, et il est beau d’occuper sa juste place dans la farouche, harmonie ambiante.

 

Quel poste vigie ! Ouvrez, les yeux, vous dirai-je ; que vos regards soient comme les rayons d’un projecteur braqué sur le Nord.

 

La muraille anguleuse des montagnes bleues, mais, d’un bleu si pur, si pur, si maghrébin, vous parlera bientôt si votre âme en est digne. Elle vous parlera un langage persuasif, — soit qu’elle s’habille de ces blanches vapeurs moutonneuses que chasse longuement un aquilon berger, — soit que l’extrême transparence de l’air permette à vos prunelles de s’accrocher aux détails infinis de ses puissants reliefs et de se noyer aussi dans, ses puits d’ombre bleue et mystérieuse.

 

Puissiez-vous contempler le Babor! Il chante incessamment toute la gamme des couleurs, depuis les splendeurs polaires de l’hiver jusqu’aux tons gris et rouilles de l’automne rêveur, après la rose d’amour du printemps et toutes les teintes d’or verdâtre que la saison brûlante sait faire éclater.

 

Il est haut, grand, imposant, avec toutes ses formes dressées, cabrées, accroupies. Ses semblants de menhirs, ses sphinges ramassées, ses tours naturelles, ses selles géantes, — qui rutilent au soleil ou s’estompent formidablement dans la nuit.

 

Et si vous laissez tomber vos regards sur le tableau qui se déroule jusqu’aux confins du douar « Cheurfas », la terre vierge et forte vous apparaîtra, toute hérissée de collines qui jaillissent de ses profondeurs comme de puissantes et fécondes mamelles entre lesquelles se faufilent des oueds silencieux, au fond de ravins encaissés et couverts de lauriers-roses, d’aubépines, ide câpriers et de tamaris, éparpillés ou réunis en massifs.

 

Dans ce site tourmenté, des fermes aux toits rouges, des gourbis de loupe, de rares bouquets de trembles ou de figuiers, des étangs minuscules où se bercent les joncs, sont un reposoir pour les yeux et présentent l’attrait d’humbles choses aimantes.

 

Il faut le voir, ce site, au crépuscule, sous la clarté lunaire qui envahit peu à peu l’espace. A ces heures la scène est biblique. Alors tintent les sonnailles des troupeaux qui passent en lente file indienne : moutons d’ocre, chèvres noires luisantes, chameaux roux qui se dandinent et bœufs pesants, à l’œil éteint, au mufle baveux. Des burnous blancs, des gandouras roses, jaunes ou bleues, éclatent dans les prés verts tandis que les syllabes gutturales s’entrecroisent sourdement, gravement, et se répercutent dans les ravins. Le recueillement comme une aile ouatée descend sur la terre. L’âme rêve mélancolique et douce et nostalgique et semble respirer comme un parfum des anciens âges. Et l’on écoute les petites flûtes de roseau qui soupirent sans tristesse dans le calme absolu du soir.

 

 

 

 

 

 

 

II

 

La nature, comme l’homme, connaît l’assoupissement nécessaire.

 

Mais la lutte convient mieux aux êtres et aux choses sur ce Mégris où pleuvent les rayons de feu de l’été et les neiges piquantes de janvier.

 

Ah! si vous saviez aussi la chanson perpétuelle des vents sur la chère montagne; les antans qui hurlent et mugissent et sifflant parfois comme des millions de djinns ; les combats que se livrent encore et toujours ces deux frères ennemis : l‘aquilon et le sirocco !

 

On les voit se précipiter l’un sur l’autre, se colleter, s’effondrer, se relever et courir et courir dans les couloirs des monts et s’enfuir en grondant lamentablement pour s’échouer enfin dans la solitude !

 

Parmi ces tourbillons des vents fous, sous leurs chaumes gris posés en vedette sur les crêtes aiguës ou tapis aux flancs des coteaux, les Arabo-Berbères; ces grands enfants crédules et vindicatifs essaient en vain de comprimer leur cœur où, s’entrèchoquent les passions de la haine, de la jalousie et de la luxure, jointes à l’amour ancestral pour la rapine et le pillage.

 

Ces rudes et fiers montagnards possèdent, plus que les Calabrais, de ces brigands fameux chevaliers du « mous » (long couteau tranchant) et du « debbous » (casse-tête), qui eussent fait pâmer d’aise un P-L Courrier : — hardis ravisseurs d’épousées, dé vierges et de courtisanes ;— brigands modernes aussi armés jusqu’aux dents, maniant fusil, sabre; poignard; vous égorgeant un homme comme ils feraient d’un agneau, capables de faire sauter une chambre à la dynamite, pour les beaux yeux prometteurs d’une épouse perfide; ou pour le plaisir plus lucratif et toujours nouveau d’emporter dans les ténèbres quelques têtes de bétail ou bien encore quatre ou cinq charges de grains; après avoir joué délicieusement avec la mort !

 

Comme l’aquilon et le sirocco les enfants du Mégris se sont acharnés les uns contre les autres de génération en génération et n’ont jamais su qu’obéir à leurs instincts violents de primitifs et de barbares.

 

Mais il leur sera beaucoup pardonné parce qu’ils furent, restent et demeureront toujours pour nous, Roumis, d’étranges et délicieux conteurs et poètes

 

 

 

 

 

 

 

 

III

 

C’est un soir de septembre, immobile et solennel. L’ombre s’étend sur la montagne, l’ombre descend dans les vallées. Là-bas le soleil qui s’éteint est comme une tête cuivrée dans un bain de sang.

 

Depuis longtemps déjà j’ai tourné les yeux vers des taches grises mouvantes qui semblent rouler maintenant vers moi comme autant de gros hérissons enveloppés de ronds irisés. Et derrière ces buissons en marche se profile une longue silhouette d’homme qui s’allonge encore et s’amplifie avec son ombre. Voici que j’entends comme des gouttes de pluie, grosses et lentes, sur un sol dur. Voici le sifflement serré et double des meneurs de moutons.

 

C’est Touati le grand berger qui ramène son troupeau au bercail.

 

Ah ! je l’ai reconnu de loin le long Touati aux jambes d’échassier, au cou lie girafe, le long Touati au long nez pointu, au long crâne pointu !

 

Il est affublé de son éternelle blouse bleue que surmonte un burnous enfantin de couleur indéfinissable. L’immense chapeau de paille lui pend sur la nuque. La houlette dans la main droite, son bras gauche va ballant, ballant, ballant. Il semble à chaque pas devoir s’affaisser sur ses énormes «godiots » éculés. Et cependant il avance, plein de sérénité,

évoquant en moi Don Quichotte; un moulin à vent, un sorcier, un fantôme; un être fait de bras, sans corps. Ses yeux sont bleus, sans commentaires; son liez, parlant, génial; incessamment ciré par le mouchoir rouge du priseur intrépide.

 

Et voilà l’aimé de mon imagination: bobine des contes édifiants ; Touati, dévidoir, chantant des récits fabuleux ; Touati, crâne plein des joyaux de légende ; Touati, l’âme central du Mégris ; Touati enfin, ouati, le roi des conteurs !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

IV

 

 

« II parle comme la rivière », disent ses coreligionnaires; avec admiration. Et en effet, il débite sans fin les anecdotes les plus variées ; il égrène en se jouant le chapelet des sentences musulmanes; il ouvre à ses auditeurs des horizons paradisiaques quand il s’élance dans la carrière des « hadits » ces traditions saintes concernant l’Apôtre de Dieu (sur qui soient la bénédiction et le salut !)

 

Nul, mieux que lui ne sait baigner les âmes dans une eau érotique. Oh ! ses inclinaisons de tête, ses langueurs penchées de thorax, dans chaque noce, dans chaque circoncision, dans tous les « retours » des choses bonnes, que l’on fête par la joie ! Oh ! son âme de chanteur ondulant parallèlement aux soupirs discrets de la «gasbah » , aux.mugissements sourds du « bendir », aux sons trépignants de la « raïta » aiguë !

 

Les jours de «souk » on l’environne, on «frappe l’anneau » vivant autour du berger-poète. Et sa langue infatigable tourne comme un cheval de parade dans l’hippodrome de la prose rimée !

 

« L’Aïd-el-fitr », la fin du mois de Ramadan, le jour de la rupture du jeûne, marque annuellement son triomphe de conteur chez les gens de la ville. Les « beldiin » (citadins) ne dédaignent pas de venir chez le barbier écouter ce « barrani » (campagnard ) maître de la parole.

 

Alors Touati « dresse le lit des vieilles » (on appelle ainsi la formule initiale des contes, destinée à appeler l’attention des auditeurs).

 

……« Je conterai et ne conterai que… »

— commence-t-il. —« Je vous donne à deviner : sans eux je ne serais pas venu jusqu’à, vous… » — « Il s’agit de tes pieds! » s’écrie un jeune.

 

Touati continue : « On rapporte qu’un sultan… mais il n’y a de Sultan que Dieu…Si je mens, qu’Allah me pardonne ! Mais si le Diable ment, qu’Allah le maudisse et le couvre de confusion !… Il y a ce qu’il y a — du basilic et des lis — dans le giron du Prophète (que Dieu lui accorde la bénédiction et le salut !)…

 

Les auditeurs répondent : « Sur lui la bénédiction et le salut ! »

 

Touati poursuit : « Mon discours est fort bien agencé — beau, merveilleux, pour l’homme sensé! … »

 

Et il entame une histoire de «sultan ». Ou bien il narre l’un des maléfices d’une vieille calamiteuse de soixante ans et il s’écrie : «La vieille d’horreur — mère du Malheur — Que Dieu ne lui soit pas clément quand elle meurt ! — Elle dit son chapelet et excite avec joie — le chien auquel elle arrache les dents quand il aboie !….

 

Et Touati parle, parle… comme la rivière !…

 

D’autres: fois il chante les exploits accomplis par les vaillants qui ont rencontré les terribles ghoules et les ont vaincues par le courage et par la ruse.

II dit encore les frissons d’épouvante à l’heure où les « t’aïf » (fantômes), les « djinn » (génies), les « rohbani» (spectres buveurs de sang), les « nezaï’a» (fantômes querelleurs), les « abri » (esprits à métamorphoses) surgissent devant le fidèle à la faveur des ténèbres complices.

 

Ami de la gaîté maligne; il sait tirer aussi du riche écrin; de sa mémoire; commutant de gemmes, des histoires circonstanciées sur les aventures des « taïeb » facétieux, effrontés et pleins de rouerie ; sur les ruses démoniaques des femmes (sauf votre respect! ), ces filles d la. trahison ! Et les éclats d’un rire franc, guttural et sonore, secouent tout à coup jusqu’aux barbes grises de l’assistance quand Touati expose, avec une mimique convaincante, les faits et gestes du pèlerin Ahmed (le Hérisson) et de son éternelle dupe, Fils de Youcef (le loup).

 

Et l’attention passionnée des auditeurs se soutient jusqu’après la formule finale qui est ainsi :

«Elle est partie (l’histoire) et roule, et roule

Et je reste parmi la foule… »

 

Ou encore :

 

« Elle est partie (l’histoire), elle a brûlé — et sur le chemin je m’en suis

allé. —

 

Et, finalement: « Il y aura trois pommes: une pour votre serviteur — une pour le conteur — une troisième dont je serai parcimonieusement le dispensateur!

Voilà ce que nous avons entendu — Voilà ce que nous avons répondu — L’Amour est pour le Prophète ! (Que Dieu lui accorde la bénédiction et le salut! )

 

Et tous les croyants disposent leurs deux mains en livre ouvert devant leurs yeux et tous se les passent religieusement sur la face tandis que montent en psalmodie les syllabes onctueuses : « Pardonne, ô Dieu… Il n’y a de Dieu que Dieu et Mohammed est l’Apôtre de Dieu ! »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

V

 

Toutes tes belles histoires, Touati, je les aime, parce que leur souvenir est comme un parfum du Mégris, demeuré dans mon âme avec l’odeur des meules de foin que tu connais, là-haut, à la lisière du gai cimetière musulman. Et le parfum se mêle au chant lointain et reposant de notre « Aïn-Guellou », la source douce et si berceuse…

 

Si vous le voulez, amis lecteurs, je vous rapporterai fidèlement quelques « dires » de Touati…

 

… Dans les grands jours d’or — où les blés tombants — sont comme une mer — rousse et parfumée. —

 

Dans les nuits d’argent — que verdit la lune — les belles nuits -d’août — où brillaient là-haut — des larmes d’étoiles.

 

J’ai pris le « Kalame » (1) — le « smeur » (2), — la « louha » (3) — et sous sa dictée — je les ai transcrites. —

 

Au nom de Dieu, Maître des Mondes!

 

Amen !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(1) Roseau à écrire.

(2) Encre arabe.

(3) Planchette.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 




Chant kabyle sur la Mort du Caïd Turc de Bordj-Sebaou

18112019

 

 Chant de Mâmer-ou-Ali des Ihassenaouen, confédération des Aït-Aïssi

 

 

 

 

 

 

 

Chant kabyle sur la Mort du Caïd Turc de Bordj-Sebaou dans Littérature s-l1600

Vallée du Sebaou

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

A ouin its id iâoussen,

Bab n el ârch lak d’el korsi,

A l khebar id innoulfan!

Iour’ ii el h’al d’eg ath Âissi.

Ekfan le djouad’, iggad’ ilhan,

amalah! Ia Meh’ammed n’ath K’assi.

 

 

Ô toi qui veille sur le monde,

Maître du trône céleste et de la toute-puissance!

Quelle nouvelle vient de se répandre!

Elle m’a surpris chez les Aït Aïssi.

Ils ne sont plus les nobles et vaillants guerriers!

Infortuné Mehammed-n-Aït-Kassi!

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ma ireggem ak ladr’a ak inçah’,

thiirsi ichoudden attefsi,

isetcha seg ial l erbah’

thammemth ed’ oud’i amerchi.

mi ithehesst’ ad’ innechrah’,

in nk, a l djid’, fi ras i.

 

 

Lorsqu’il vous faisait une promesse, il y était toujours fidèle,

le nœud le plus serré était délié;

il servait à ses hôtes des mets choisis de toute sorte,

du miel, du beurre, la plus pure farine de froment;

quand il était de bonne humeur, il devenait expansif,

il vous disait : « Noble guerrier, ton affaire est dans ma tète ».

 

 

 

 

 

 

 

 

A Meh’ammed, a izem abedjah’,

Hammouda bacha a Thounsi!

Bou themed’ehebth s el selah’,

Er ratheb is izga iouli.

Inr’a l k’aid’ r’ef eçd’ah’

D’eg el bordj iggouth el r’achi.

 

 

O Mehammed, lion bondissant!

Hammouda pacha, le Tunisien! (1)

Au fusil doré, aux belles armes;

Sa position était toujours grande.

Il a tué le caïd sur la terrasse.

Au milieu du bordj rempli de monde.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mençour, a ithri n eçbah’,

A l baz ah’arour bou le keboul,

A thah’azamth n el bey Salah’,

Aômar r’ef nedehenel’ t’eboul.

Ma iour’dhadh izem itchah’,

Ibdha l âk’el d’oumerh’oul.

 

 

Mançour, étoile du matin, (2)

Faucon de noble race au capuchon,

Ceinture du bey Salah, (3)

Ômar, pour qui rappellent les tambours! (4)

Lorsque le lion en fureur rugit,

La caravane perd la tête.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Oufir’ ecch chaouch enni ijah’

Ir’il a th iarez amm outhoul,

Inna ias: ass a d’agsouah’

A tharouih’ath d’eg netsmoukoul!

Inr’a ech chaouch d’egg oumrah’

Le khebar ibbodh Est’amboul.

 

 

Ce chaouch était insensé,

Il croyait le garrotter comme un lièvre;

Mançour lui dit: «ce jour est fatal,

Ô ma vie, je te vois finir».

Il a tué le chaouch dans la cour,

La nouvelle en est arrivée à Stamboul

 

 

 

 

 

 

 

 

 

As el le khemis louhi el âcer

S oud’em ne temeddith

Le khebar ibbodh r’er ezmoul

rekeben at tseriah’ith,

Rouh’en le djouad’ akken ellan,

Gan r’er el bordj thimelilith.

 

 

Le jeudi, à l’heure de l’âcer,

À l’approche du soir,

L’ordre arriva aux zemoul (5)

Les cavaliers aux reahia montèrent à cheval;

Ils partirent tous, les nobles guerriers,

Et se donnèrent rendez-vous au bordj (6)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mi iberrah’ s el aman ikhed’â ____ oud’em ne touar’ith

Idhemâ ad igeri es le çelah’ ____ ir’il ad’ igeri es thalouith.

A Meh’ammed n ath K’assi, ai ounegal! ____ rebbi ithebbeth ith;

Seg zik thezouar asen ____ tsaneçelith;

Issali eznad’ inebha s ____ iouth el K’aid’ isser’li th.

 

 

 

Après avoir publié l’aman, il les trahit, __ Le visage de malheur!

Il voulait survivre en paix à ses victimes, __ il croyait rester et vivre en repos.

Ô Mehammed-n-Aït-Kassi, ô beau guerrier! __ Dieu lui donna la fermeté;

Depuis longtemps se transmet dans sa famille __ la pureté de race;

Il arma son pistolet et, après avoir averti __ Il frappa le Caïd et le renversa.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ou bellah a k azemer’ at’t’ir __ ifeg ik âlli th;

R’er izouaoun d’i thleth __ izem oula h’add ith.

Si Kaf el Âougab ar Mek’lâ __ thamethilt is oula h’add its.

 

 

Par Dieu! Je t’enverrai en message, ô oiseau, __ élève ton vol dans les cieux;

Dirige-toi vers les Izouaoun (7); ils sont tois __ mais le lion n’est plus parmi eux.

Depuis le Kaf-el-Aogab (8) jusqu’à Meklâ (9) __ il n’y avait pas son pareil.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ai agellid’ its inechan

Allah! Ai amr’ith,

Daâr’ k in, a bab igenouan,

S eç çah’aba at tsârdhith,

Djemiâ akka id nemsemlal

Kera ih’adheren d’a reh’am ith.

 

 

 

Ô roi qui as créé le monde

Dieu protecteur!

Je t’implore, ô maître des cieux

Par les compagnons du Prophète, ces modèles d’honneur;

Sois miséricordieux pour nous tous qui sommes rassemblés

Aie pitié de tout ce qui est ici présent.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Le contexte historique: Ici 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

N.B:

 

(1): pour faire l’éloge de Mehammed-n-Aït-Kassi, l’auteur le compare à Hammouda Pacha, bey de Tunis, mort en 1814 et dont la mémoire est restée très populaire dans le pays.

 

(2): Mançour-Abou-Khalfiou, assassiné dans le bordj Sebaou par Ali-ou-Mahiddin de Taourga.

 

 

(3): le bey Salah est un bey de Constantine, mort en 1793.

 

 

(4): Mançour est comparé à l’Agha Ômar, grand dignitaire du gouvernement turc.

 

 

(5): dans la vallée du Sebaou, on appelle zemoul, pluriel de zmala, les villages de la tribu Makhzen des Âmraoua. Il est question ici de l’ordre donné par le Caïd de réunir les goums au bordj Sebaou.

 

 

(6): le bordj Sebaou, situé au sommet d’une montagne dont le pied est baigné par le Sebaou, est à 4 lieues environ au-dessus de Tizi-Ouzou.

 

 

(7): les Izouaoun sont les membres de la famille de Ahmed-Azouaou, assassiné dans le fort.

 

 

(8): le Kaf-el-Âougab ( le rocher des milans) est situé près du Sebaou, un peu au-dessus du bordj Sebaou. Au pied du rocher se trouve un village qui porte le même nom.

 

 

(9): Meklâ, village des Âmraoua d’en haut.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 




Les Poètes Populaires Blidéens à la fin du 19ème siècle

13102019

 

 

 

 

 

 

Les Poètes Populaires Blidéens à la fin du 19ème siècle  dans Littérature 1567939602-s-l1600

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La liste des poètes de l’époque ainsi que le nombre des chanteurs et musiciens blidéens.

 

 

 

 

 

 

 

 

Poètes. —

 

 

 

1. Si Qaddour ben Akhlîfa, né entre Coléa et les Hadjoutes,mort vers 70 ans, en 1897? vécut à Blida. Marchand de légumes au marché arabe, ancien régulier d’Abd-el-Qader: a écrit des medh‘ sur les saints locaux : Sidi Ah’med el Kbîr, Sidi Moussa, Sidi Ya’qoub, etc. A écrit en vers des ghazaouat ou récits des guerres qu’il transcrivait de l’arabe régulier des livres, en poésie populaire. (Ex. : Ftouh’ el Iamen). A composé des satires sur les tristesses de l’époque présente, la décadence des mœurs, le respect des enfants envers leurs parents, etc. (Satires du genre وعظ ou exhortation.)

 

 

 

 

 

2. Echcheikh Qaddour ben Gâli, né à Alger, mort vers 60 ans, le 31 mars 1905 à Blida. Chanteur : se réclamait pour les chants andalous de Mnemmech dont il aurait été l’élève avec Sphindja (d’Alger), aurait voyagé à Tanger pour grossir son recueil. Musicien : jouait de la kamendja, du rbab, de la kouitra, etc. Compositeur de musique. Poète : a écrit des h’aouzi et des ‘aroubi sur le vin et l’amour.

— Métier : faisait sur la fin de ses jours des guitares en carapace de tortue (قنيبري)

 

 

 

 

 

3. Si Ah’med el Qsentînî, né à Blida de parents constantinois venus à Blida en 1832, a environ 60 ans. (en 1905) — Métier :iqqach, c’est-à-dire diseur de bonne aventure, vendeur de remèdes magiques, etc. Chanteur de medh‘ chez les Beni Khalil (Boufariq), il s’accompagne du deff et est soutenu par un gueççâb. Instrumentiste :joue de la kamendja, de la kouitra, du qanoun, du t’âr, de la darbouka dans les soirées à Blida. Poète : a écrit des medh‘ sur les saints et des satires personnelles (genre هجا).

 

 

 

 

 

4. Qardjadj, de la tribu de Ghellaï, au sud-est de Blida. Cultive la satire.

 

 

 

 

 

5. El ‘Arbî el Ghellaouï, même tribu. Maçon de son métier, écrit des satires personnelles ; élève de Sidi ‘Achour, zaouia au sud de Dalmatie.

 

 

 

 

 

6. Ahmed el Baï, né chez les Beni Salah, élève de la zaouia de Sidi Ahmed el Kbîr, environ 45 ans (en 1905) ; travaillait à une papeterie française quand Ahmed el Kbîr lui apparut en songe et lui ordonna de se faire meddah‘. En un an il apprit son nouveau métier de Si Ah’med el Qsentini. Fort demandé pour les fêtes chez les Beni Khalîl et les Hadjoutes. Au mois de ramdan il chante des medh‘ dans les cafés maures de Blida. Un des rares chanteurs qui vivent de leur métier.

 

 

 

 

 

7. Parmi ceux qui écrivent des qçaïd ou chants en vers classiques, il faut citer Si Mohammed ben Sidi ‘Abd el ‘Azîz, fellah ayant des terres aux Ouled Meriem, du côté d’Aumale, habitant Blida. Il célèbre le prophète et les saints en arabe régulier. On pourrait signaler des poésies contemporaines écrites dans le style et la métrique andalous.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Liste des chanteurs. — Mdadh’a, chanteurs de medh’.

 

 

 

 

1.Ahmed el Qsentini (voir parmi les poètes).

 

 

 

 

2.Son frère Mohammed el Qsentini, coiffeur.

 

 

 

 

3.Si Ben ‘Aïssa Mouloud, qui a eu pour maître Mançoura, qui fut le meddah‘ de Blida comme Ben Ismaïl le fut d’Alger.

 

 

 

 

4.Si Mohammed el Ouçif, savetier de son métier, élève d’El Qsentini.

 

 

 

 

5.El Baï (voir poètes), Si Mohammed Salam.

 

 

 

 

6.El hadj Ekhlil, menuisier.

 

 

 

 

7.Si Ali Bouchâchi, chante chez les Beni Khalîl et les Hadjoutes.

 

 

 

 

8. Qerdjadj chez les Ghellaï et les Beni Salah.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Chanteuses:

 

 

 

1.El Hadjdja.

 

 

 

2. Chrîfa.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Viennent d’Alger : Sfindja, Qouider ben Sm’aïl, Mostfa Ennad’or, Mostfa Eddrouich, Qaddour Tebri, etc. Ajouter un nombre considérable de chanteuses nomades surtout du département d’Oran.

Le prix d’un meddah‘ et de sa troupe d’instrumentistes est de 20 à 30 francs par nuit. Les mdadh’a étrangers prennent 40 francs. Le ghennaï est payé au minimum 40 ou 50 francs sur lesquels il donne 20 francs à la femme qui l’accompagne. Si Mah’moud a été payé bien plus cher.

 

Ordinairement le chanteur chante des medh‘ jusqu’à minuit (iemdah’), puis il chante des chansons du genre léger (ighennî).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ghennaïn — Chanteurs érotiques —

 

 

 

 

1. Le plus justement renommé est Si Mahmoud ben Sidi Saîd Geddoura, né à Alger, environ 35 ans (en 1905), élève de Yamina, la chanteuse algérienne, pour la kamendja ; joue aussi du rbab, etc. Chanteur plein de goût des chants Andalous. Son répertoire très riche se compose de tous les genres : ghernata, medh‘, haouzi, aroubi, etc.

 

 

 

 

2.Son frère Mostfa ben Sidi Said (25 ans) joue de la qouitra et du djouaq.

 

 

 

 

3. Khlîl ben Djelloul, chanteur, joueur de kouitra et de snitra (mandoline). Ces trois premiers chanteurs forment une ala (troupe).

 

 

 

 

4.Si Qaddour ben Gâli (voir poètes), jouait de la kamendja, rbab, kouitra, qanoun, ghaïta, djouaq. Il venait le second après Si Mahmoud.

 

 

 

 

5.Kenidchou, chante.

 

 

 

 

6.Si Qaddour ben ‘Adoul, chante et joue de la kamendja, ghaïta (60 ans en 1905).

 

 

 

 

7.Mali Ahmed ben Hamoud, chante, joue du gonibri, kamendja.

 

 

 

 

8.Ben Youssef ben Djelloul, kamendja.

 

 

 

 

9. Ben Aissa Eçbah’i, kamendja, kouitra, chante.

 

 

 

 

 

10.Içhaiq l’israélite, kamendja, chante au café-concert.

 

 

 

 

11.Boubbach, kamendja.

 

 

 

 

12.Mohammed el Ouharanî, kamendja, qanoun, kouitra.

 

 

 

 

 

13.Qaddour Echcherchàli, kamendja.

 

 

 

 

 

14.Qaddour Esbaliouni, espagnol, snitra (mandoline).

 

 

 

Ces cinq derniers sont instrumentistes au café-concert arabe de Blida.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 







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