La Petite Mère Volga
1 03 2020
«Ceux qui ont goûté à l’eau de la Volga, qui ont admiré la beauté du fleuve reviendront».
Vieux proverbe Russe.
La Volga, symbole de la Russie, est chère au cœur des Russes qui l’ont surnommée Matouchka Volga, Petite mère Volga.
Elle est mentionnée pour la première fois par le philosophe grec Ptolémée au IIe siècle, sous le nom de Rha. D’où le nom de Rhadanites donné aux marchands juifs ou persans qui, au Moyen-Age, commerçaient entre le Moyen-Orient, via la Mer Noire et les pas Scandinaves. Jusqu’au VIIIe siècle, les Slaves l’utilisent comme voie de communication. Au XVIe, le Volga devient entièrement russe, lorsqu’Ivan le Terrible conquiert Kazan et Astrakhan. Les premiers bateaux à vapeur apparaissent sur le fleuve dès le XIXe siècle.
Le Plus Long Fleuve d’Europe
La Volga est le plus long fleuve d’Europe avec 3 690 km. Elle draine un bassin de 1 360 000 km² qui couvre 30% de la plaine russe.
Elle prend sa source dans les hauteurs du Valdaï, non loin du joli lac de Seglier et se jette dans la Mer Caspienne. Son delta de 10 000 km² est formé de 80 bras, dont 4 sont navigables. Axe important, elle assure la moitié du trafic fluvial du pays. Elle est le trait d’union entre la Caspienne, la Baltique, la Mer d’Azov, la Mer Blanche et la Mer Noire. Grâce au système du canal des Cinq Mers qui la relie à la Moskiva, au Don et à la Dvina septentrionale; les bateaux partis de l’Arctique rejoignent la Méditerranée en trois semaines.
Le régime fluvial est sous la dépendance d’un climat continental aux hivers longs et froids, aux étés chauds et à tendance aride vers le sud. Le fleuve est pris par les glaces durant quatre mois au nord, trois mois au sud. La fonte des neiges annonce le printemps, fin mars sur le cours inférieur, début avril à Volgograd, et fin avril à Nijni-Novgorod. Il se traduit par l’inondation de la plaine alluviale. De juillet à septembre, le fleuve connaît un étiage. A la fin de l’été, le niveau de l’eau est parfois si bas qu’il entraîne des risques d’ensablement.
Des Centaines d’Affluents
En traversant les grandes plaines russes, la Volga reçoit les eaux de centaines d’affluents qui font sa puissance et sa beauté.
Dans sa partie supérieure, elle coule selon une direction générale ouest-est et traverse le domaine de la taïga. Son principal affluent est l’Oka, qui la rejoint, sur la rive droite, à Nijni-Novgorod. La Kama lui apporte les eaux de l’Oural.
En aval de Kazan, le fleuve change d’orientation et suit un tracé nord-nord est et sud-sud ouest, jusqu’à Volgograd où il se divise en deux bras. Pendant tout ce trajet, le fleuve est dominé sur sa rive droite par le rebord des hauteurs de la Volga, orientées nord-sud, mais recoupées par un accident transversal, la crête calcaire des Jigouli, qui le fleuve contourne par la boucle de Kouïbychev. En aval de Kouïbychev les steppes son plus sèches et fournissent peu d’eau.
Des Régions Naturelles Diversifiées
Le bassin de la Volga s’étend sur plusieurs zones naturelles et occupe 1/3 de la partie européenne de l’ex-URSS. De sa source jusqu’aux villes de Nijni-Novgorod et de Kazan, la Volga coule dans une zone de forêts, puis, jusqu’à Samara et Saratov, dans une région de forêts et de steppes. Dans sa partie sud, elle traverse des steppes arides et semi-arides. Cela explique la diversité de la flore. La faune varie en fonction des régions: grands tétras, gélinottes, outardes, lièvres, renards, loups, élans, martres, écureuils, marmottes….sont les habitants familiers de ses berges.
La flore varie tout au long de son cours. Aux forêts de sapins du nord-est, succèdent des chênes et même des tilleuls. Au nord de Iaroslavl, des bois de conifères, de sapins (épicéas), se mêlent aux bouleaux et aux trembles. Au sud les bois sont mixtes, associant aux conifères et latifoliés, des frênes, des érables et des chênes.
Le fleuve est peuplé de 75 espèces de poissons, dont 40 font l’objet d’une pêche industrielle. Les principaux sont le hareng, le brême, la sandre, la carpe, le silure, le brochet, l’esturgeon et le sterlet. On pêche également du vobla dans les eaux de la Volga. C’est un poisson que les russes aiment faire sécher pour le manger accompagné de vodka!
Un Fleuve Aménagé
Ce fleuve nourricier a attiré aussi une grande variété de populations. Tatars, Bachkirs, Tchouvaches, Maris, Mordves et Oudmourtes s’y côtoient avec les descendants des colons allemands qui y furent installés au XVIIIe siècle sous le règne de Catherine II. La République autonome des Allemands de la Volga fut constituée pour les regrouper en 1924. Staline, craignant une avancée allemande dans les années 30, les accusa de complot contre la Russie et les déporta en masse vers la Sibérie et l’Asie Centrale en 1941 et leur République disparut.
Depuis les années 1930, la Volga compte 7 centrales hydroélectriques. L’aménagement du cours supérieur du fleuve a commencé avec la construction des réservoirs d’Ouglitch et Rybinsk, destinées à réguler le flux et à approvisionner la capitale en eau par le canal de Moscou.
Le projet ambitieux de Staline d’endiguer la Volga et la Cheksna, pour créer un immense réservoir, fut mené de façon totalement irresponsable par le Comité des Affaires Intérieures qui administrait le travail des prisonniers du Goulag. Plus de 700 villages furent inondés pendant la construction du réservoir, perturbant gravement les équilibres naturels et entraînant une baisse sensible du niveau de la Mer Caspienne. Ce réservoir était destiné à mettre fin aux méthodes de transport du temps des tsars.
Avant
Ville disparue de Mologa
Le Danger Écologique
Les grandes réformes économiques qui sont menées dans le pays sont liées étroitement aux questions de la protection de l’environnement. La santé des habitants est gravement menacée par les rejets de la production industrielle et agricole des principaux fleuves. Sur les 100 villes du pays les plus polluées, 65 se trouvent sur le bassin de la Volga. En effet, 45% de la production industrielle et 50% de la production agricole de la Russie sont concentrées dans cette région qui couvre 8% de la superficie de pays. Les stations d’épuration et les réseaux de distribution sont vétustes et nécessiteraient d’être entièrement rénovés.
Les indices de pollution dans les bassins de la Volga sont de 3 à 5 fois supérieurs à ceux du reste du pays. Pratiquement aucune ville n’est approvisionnée en eau potable de qualité suffisante. La pollution a des effets nocifs sur la qualité des produits alimentaires. Les maladies et la mortalité, surtout la mortalité infantiles, ne font que s’aggraver.
Les centrales thermiques sont responsables de 19% des rejets dans l’atmosphère, de 35% de la pollution des eaux usées et de près de 30% des déchets qui encombrent les terres productives et polluent les eaux souterraines.
Un centre de surveillance de la Volga a été ouvert en avril 1998 à Nijni-Novgorod. Trois satellites russes et un américain doivent fournir des informations sur le bassin du fleuve, les risques de crues et d’incendies. Un réseau informatique transmettra les informations recueillies aux provinces de la Volga. Ce centre a été mis en service dans le cadre du programme écologique Renaissance de la Volga élaboré par le Gouvernement de la Fédération de Russie jusqu’à l’an 2010.
Ce programme doit fonctionner au niveau de la Fédération, des territoires (républiques, régions), des municipalités et des provinces. Il prévoit la mise en oeuvre d’un grand nombre de technologies modernes, la reconstruction et la modernisation des usines de production pour empêcher et arrêter la dégradation des ensembles naturels. Les terres agricoles devront être plus productives grâce à l’utilisation de nouvelles technologies. Les conditions de vie de la population devront être considérablement améliorées par de nouveaux aménagements urbains, le rétablissement de zones sanitaires de protection. Les forêts, la faune, la flore devront faire l’objet de mesures de protection très stricte. L’assainissement des rivières est également prévu pour améliorer la qualité de l’eau et de la pêche.
Le lac artificiel de Rybinsk est tout particulièrement touché par la pollution. Lors de sa mise en eau en 1941, plus de 4000 ha de terres cultivées ont été inondées. L’eau a pris une teinte verdâtre en raison de l’apparition d’une algue qui provient de la décomposition des forêts submergées à l’époque et qui absorbe l’oxygène de l’eau, provoquant la mort des poissons.
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