La Grande Mosquée de la Zitouna
16 12 2019
Située au cœur de la ville, la Grande Mosquée, appelée aussi el-Zitouna, mosquée de l’Olivier, est le plus vaste et le plus vénérable sanctuaire de Tunis sa fondation se confond avec celle de la cité (78/698). Elle bénéficia de grands travaux, menés en 113/732 par le gouverneur Abdallah Ibn el-Habhab, auquel certaines sources attribuèrent à tort cette fondation. C’est à l’émir aghlabide Abou Ibrahim Ahmed que nous devons l’essentiel du monument actuel. Ce prince démolit complètement la première mosquée et la rebâtit.
Comme la mosquée de Kairouan, la Zitouna répond au plan dit basilical dans lequel les nefs se dirigent en profondeur, perpendiculairement au mur de fond. C’est un type qui apparaît de bonne heure en Syrie-Palestine dans la mosquée el-Aqsa à Jérusalem. Comme Kairouan, la salle de prière hypostyle est précédée d’une cour, sahan, le plafond en charpente repose sur 184 colonnes et chapiteaux antiques délimitant 15 nefs de 6 travées. Les éléments antiques employés dans cet édifice proviennent pour l’essentiel des ruines de Carthage. Leur utilisation atteste de l’ingéniosité des architectes du IIIe/IXe siècle qui, à partir d’éléments épars, créaient des œuvres d’une parfaite harmonie. La nef médiane ainsi que la nef transversale du transept sont plus larges que les autres et se croisent à angle droit au-devant du mihrab. La figure en T créée par ces deux nefs est à rapprocher, selon certains historiens de l’art, de basiliques telle celle de la Nativité à Bethléem. Le devant du mihrab est marqué par une coupole datée par inscription de 249/864.
Elle présente de l’extérieur une calotte à cannelures qui repose sur un tambour octogonal, supporté par une base carrée. Une inscription, également du IIIe/IXe siècle, court en frise le long de la façade de la salle de prière.
La mosquée était entourée d’un mur de pierre en gros appareil; deux tours d’angle, dont l’une est encore visible à l’angle nord-est situé à droite de l’entrée principale, attestent du rôle défensif que jouaient les premières mosquées. Parmi les six portes qui donnent accès à la mosquée, la porte de l’Imam, donnant sur le souk de Laine, présente un encadrement romain, décoré de feuilles d’acanthes où l’on remarque la suppression par martelage de certains motifs figuratifs.
Aux Fatimides, ou plutôt aux Zirides, la Zitouna doit le narthex et la coupole du bahou qui marque l’axe de la façade. L’apparition des assises alternées bichromes n’est pas sans nous rappeler Cordoue ou les monuments omeyyades de Syrie-Palestine, comme la Coupole du Rocher; à moins que nous n’assistions là à la reviviscence d’une tradition locale dont nous avons une représentation dans une mosaïque romaine du Bardo. La profusion des niches rattache la coupole à l’art fatimide.
Au Ve/XIe siècle, les Beni Khourassan ouvrirent largement la mosquée sur son environnement en augmentant de 6 à 12 le nombre des portes. Celle donnant sur le souk el-Attarine est surmontée d’une inscription la datant de 473/1080. Les interventions des Hafsides ont enrichi la Zitouna d’éléments décoratifs hispanomauresques à entrelacs géométriques tels ceux réalisés sur les boiseries des portes isolant la salle de prière de la cour: Œuvre de Abou Yahya Zakariya. De cette époque, date la belle façade aux fenêtres géminées de la bibliothèque de Abou Amr Othman, formant l’angle sud-est à l’extrême gauche de l’entrée principale. Cette période a connu un important accroissement démographique, ce qui a nécessité l’aménagement d’une cour latérale à l’est.
Rare : La mosquée Zitouna du temps de l’ancien minaret – 1880 -
Aux époques turque et husseinite, seules trois interventions architecturales méritent d’être signalées parce qu’elles ont modifié l’aspect de l’édifice. Il s’agit de la couverture de la cour latérale ainsi que de l’embellissement des trois galeries de la cour principale et du minaret. En 1096/1685, l’imam el-Bekri ordonna la couverture de la cour latérale par un plafond plat, soutenu par une triple colonnade à chapiteau hafside en kadhal, pierre calcaire locale. Le Premier ministre Khaznadar dota les trois galeries de la cour principale de colonnes à chapiteaux composites en marbre blanc d’Italie, directement importé de la Péninsule, comme il était désormais d’usage pour tout le marbre utilisé dans les constructions tunisiennes. La dernière retouche apportée à ce prestigieux monument fut l’édification du minaret actuel qui remplaça un minaret plus modeste. La tour actuelle mesure 43 m et reprend le décor du minaret almohade de la mosquée de la casbah.
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